Gaspard Monge, comte de Péluse (1746 – 1818)

 

 

Gaspard Monge est l'inventeur de la géométrie descriptive.

Il a fait partie des scientifiques français qui ont poussé à l'instauration d'un système de poids et mesures fondé sur le système décimal.

La numération décimale avait été introduite en Francie par Gerbert d'Aurillac, devenu pape vers l'An mil sous le nom de Sylvestre II, mais elle ne s'était pas encore généralisée aux poids et mesures.

Par le décret du 8 mai 1790 obtenu par Talleyrand, l'Académie des sciences reçoit la mission de mettre au point un système d'unification des poids et mesures. Gaspard Monge fait partie de la Commission Centrale des Poids et Mesures qui doit mettre en œuvre cette décision, avec Condorcet, Laplace, Lagrange, et Borda.

Après avoir reçu des départements les étalons des anciennes mesures, la commission cherche l'unité appropriée. Dans son rapport du 19 mars 1791, la commission propose d'adopter la longueur du quart du méridien terrestre pour base de mesure, et sa dix millionième partie pour unité usuelle. Ce sont les bases théoriques du système métrique, ainsi que du système international d'unités (SI) des poids et mesures tel qu'il existe de nos jours.

Gaspard Monge est aussi parmi les personnalités qui proposent d'instaurer un calendrier avec des semaines de dix jours. Le calendrier républicain ne dure pas au-delà de 1806, en raison de diverses difficultés.

Monge a aussi donné son nom à une classe de problèmes génériques de transport optimal de masse, connu sous le nom de Problème de Monge-Kantorovich (ou MKP, pour Monge-Kantorovich Problem), ce dernier ayant reçu le « Prix Nobel » d'économie en 1975, et est connu pour avoir prouvé l'existence d'une solution optimale à ce problème en 1942. Monge a introduit ce problème dans son "Mémoire sur la théorie des déblais et des remblais" en 1781.

 

Il étudie au Collège des Oratoriens de Beaune avec ses deux frères, où il reçoit de la part des religieux une éducation libérale, puisqu'en plus des humanités, il est instruit en histoire, sciences naturelles et mathématiques et montre les premiers signes de son excellence, ainsi le directeur le qualifiait de "puer aureus" (l'enfant d'or). À l'âge de quatorze ans, il construit une pompe à incendie, dont les effets frappèrent d'admiration. À l'âge de seize ans, il part terminer ses études au Collège de la Trinité de Lyon, d'où il revient deux ans plus tard, non sans y avoir donné, à dix-sept ans à peine, un cours de sciences physiques.

Revenu à Beaune, Monge dessine un plan de la ville qui lui vaut d'être remarqué par le lieutenant-colonel du Vigneau de l'École royale du génie de Mézières où il est bientôt engagé comme dessinateur en 1765. Il y fait la connaissance de Charles Bossut, le professeur de mathématiques de l'École, avec qui il peut discuter de ses idées sur la géométrie. Cependant il ne peut pas devenir officier du génie puisqu'il n'était pas de famille noble. Un an après son arrivée, on lui confie la réalisation de plans de fortifications. En 1766, Bossut le choisit comme répétiteur de mathématiques, chargé de suppléer ses cours. Monge fait entrer la géométrie descriptive dans l'enseignement de l'école.

En 1768, Bossut est élu à l'Académie des sciences et l'encourage à publier ses travaux en géométrie, ce qui est fait en 1770.

L'année suivante, il entre en contact avec d'Alembert et surtout Condorcet, qui le pousse à présenter quatre mémoires, un dans chacun des domaines des mathématiques qu'il étudiait alors : le calcul des variations, la géométrie infinitésimale, la théorie des équations aux dérivées partielles et la combinatoire.

Au printemps de 1774, Gaspard Monge rencontre un puissant protecteur, le marquis de Castries. Il commence à nouer une très longue amitié avec le fils du concierge de ce dernier, Jean-Nicolas Pache.

Pendant les années suivantes, il publie encore de nombreux travaux, élargissant ses vues à la physique, la chimie et la métallurgie. Le 12 juin 1777, il épouse Catherine Huart.

Partageant son temps entre Paris, où il donne un cours d'hydrodynamique, et Mézières, il se voit offrir le poste de Bézout en tant qu'examinateur des cadets de l'École de la marine royale.

La Révolution française, qu'il soutient dès 1789, change complètement le cours de sa vie, alors qu'il est un des scientifiques les plus importants de France.

Vraisemblablement vers le mois de juin 1790, il entre dans un premier club modéré, la société patriotique de 1789, située au Palais-Royal.

Il devient membre du Club des Jacobins, où l'on trouve également Robespierre (dont il fut proche), Saint-Just, … Il en sera élu vice-président la veille du 9-Thermidor (27 juillet 1794).

Il accepte d'entrer dans la société patriotique du Luxembourg créée par son ami Jean-Nicolas Pache, dans la section des Quatre-Nations, comme l'un des électeurs destinés à nommer les vingt-quatre députés de la Seine. Les statuts, acceptés en janvier 1792, précisaient qu'elle agissait pour répandre la connaissance des devoirs et du rôle des citoyens dans la Constitution. C'était un des clubs les plus extrémistes de l'avant-scène révolutionnaire, selon François Perrault.

Le soir du 10 août 1792, il est nommé avec cinq autres personnes (dont Danton) membre du conseil exécutif provisoire. Il occupe dès lors le poste de ministre de la Marine et s'installe rue Royale.

Après le début des activités de la Convention le 22 septembre 1792, il conserve son poste de ministre de la Marine dans la Première République naissante.

Il est l'un des promoteurs du calendrier révolutionnaire, avec Fabre d'Églantine.

Il démissionne de son poste de ministre de la Marine le 10 avril 1793, dépassé par les querelles politiques, et retourne à l'Académie des sciences, mais celle-ci est dissoute par la Convention en août de la même année.

Républicain convaincu, soutenant ardemment la Révolution, il continue de travailler sur des projets militaires ou encore sur une réforme du système éducatif :

Sur le rapport de Barère, par le décret du 11 mars 1794 de la Convention, il est nommé membre de la commission chargée de la création d'une commission des travaux publics, à laquelle revient la direction des Ponts-et-Chaussées, des bâtiments civils, des travaux maritimes et du génie militaire. Lazare Carnot (dit le "grand Carnot", l'organisateur de la Victoire de Valmy) y participe également.

Un premier projet est refusé par le comité de Salut Public, qui confie un dossier plus ambitieux de création d'une école centrale des travaux publics, qui deviendra l'École polytechnique.

Il aide Jacques-Elie Lamblardie, directeur de l'école des Ponts-et-Chaussées et premier directeur de la nouvelle école, pour l'organisation et l'installation de l'école à l'Hôtel de Lassay, à côté du Palais Bourbon.

Il y est aussi enseignant, formant les futurs professeurs et formalisant ses travaux sur la géométrie infinitésimale. Il donne aussi un cours de géométrie descriptive dans une autre école, créée pour former les professeurs de l'enseignement secondaire : l'École normale supérieure.

Gaspard Monge part de Paris le 6 février 1798 pour Rome. Ordre est intimé au pape Pie VI, au nom de la République française, de renoncer à son autorité temporelle, et de se contenter de son autorité spirituelle. Comme on savait que c'était irréalisable, on lui substitue un ordre de partir sous deux jours. Pie VI part dans la nuit du 19 au 20 février 1798.

Après les exactions du général André Masséna et son renvoi (2 mars 1798), Monge fait les nominations à toutes les fonctions de la nouvelle « République romaine », hormis les finances.

Après le 18 brumaire, Monge est nommé membre du Sénat conservateur dès sa création. Il en devient Président du 19 mai 1806 au 1er juillet 1807.

À la Restauration, Gaspard Monge est écarté. Une ordonnance royale du 13 avril 1816 licencie l'École polytechnique. Elle est ressuscitée le 17 janvier 1817 sous le nom d'École royale polytechnique.

Seuls quelques fidèles continuent de voir Gaspard Monge. Il est frappé de plusieurs attaques d'apoplexie et meurt le 28 juillet 1818. Ses obsèques ont lieu en l'église Saint-Thomas d'Aquin à Paris. Le 2 août 1818, les élèves de l'École polytechnique, passant outre aux interdictions, lui rendent un dernier hommage au cimetière du Père-Lachaise. Ses cendres seront transférées au Panthéon en décembre 1989.