Manufacture Nationale de Sèvres

 

 

En 1740, une manufacture de porcelaine est fondée à Vincennes grâce au soutien de Louis XV et de Madame de Pompadour. En 1756, la manufacture est transférée à Sèvres dans un bâtiment construit à l'initiative de Madame de Pompadour, à proximité de son château de Bellevue.

Long de 130 mètres et haut de quatre étages, il est édifié entre 1753 et 1756 par l'architecte Lindet à l'emplacement de la ferme dite « de la Guyarde ». De part et d'autre du pavillon central, surmonté, à l'étage des combles, d'un fronton sans sculpture portant l'horloge de l'ancienne Verrerie royale, le bâtiment se développe sur deux longues ailes terminées, aux deux extrémités, par des pavillons d'angle. Le pavillon central est précédé d'une cour dite du public, fermée par une grille en fer forgé. Face à la manufacture est aménagée une demi-lune pour permettre le stationnement des carrosses des visiteurs. Au rez-de-chaussée, le bâtiment renfermait les réserves de terres, le bûcher et les dépôts de matières premières. Le premier étage abritait les ateliers de moulage, de plâtrerie, de sculpture et de gravure ainsi que les fours. Au deuxième étage se trouvaient les sculpteurs, tourneurs, réparateurs et garnisseurs. Enfin, l'étage sous comble abritait les peintres, doreurs, animaliers et figuristes.

La manufacture est rattachée à la Couronne en 1759. De 1800 à 1847, la manufacture prend son ampleur et sa renommée internationale sous la direction d'Alexandre Brongniart, nommé par Claude Berthollet.

Depuis 1875, la manufacture s'est déplacée dans des bâtiments spécialement construits par l'État français, en bordure du parc de Saint-Cloud. C'est toujours dans ces lieux, classés Monument historique, que la production se poursuit.

Les créations de la manufacture sont visibles dans seulement deux galeries. La première à Sèvres, et la seconde au cœur de Paris, dans le 1er arrondissement, entre le Louvre et la Comédie Française. La manufacture organise en outre de nombreuses expositions dans le monde, et participe à de nombreux salons et foires d'art contemporain.

À la Manufacture de Vincennes, en plein développement, en 1748, on crée une "fleurisserie" composée d'une vingtaine de jeunes filles sous la direction de Mme Gravant. Elle sera en activité jusqu'en 1753 où l'on interdira les femmes au sein de la Manufacture; Sèvres comptera en 1756, deux cents employés de sexe masculin.

« … les rares femmes qui continuèrent de travailler à Vincennes puis à Sèvres, après cela [« Fleurisserie »], le firent désormais chez elles, apportant et reprenant chaque jour, en dépit des risques de casse, les ouvrages délicats de peinture ou de brunissage » .

Le kaolin provenait traditionnellement de Saint-Yrieix, près de Limoges. Actuellement, les sources se sont diversifiées. La couverte, destinée à être appliquée sur la pâte de kaolin cuite comme émaillage, est constituée principalement de pegmatite de Marcognac, mélange de feldspath et de quartz.
Le bleu de Sèvre est une couleur caractéristique de la manufacture. Il s'agit d'un oxyde de cobalt qui est incorporée dans la couverte.

Le céramiste Ambroise Milet entre à la manufacture ou sera nommé successivement « Directeur des fours et des pâtes » et « Chef de fabrication » avant de quitter la manufacture en 1883 à 54 ans. L'un des plus grandes tâches qu'Ambroise Milet aura à mener sera la construction de six grands fours à bois en 1877. Ces fours sont aujourd'hui classés monuments historiques.

Le bois utilisé pour chauffer les fours est exclusivement du bois de bouleau. Sa combustion forte et rapide est uniforme, sa flamme est longue et il dégage peu de cendres. Ce bois est le seul capable de porter le four aux températures recherchées (petit feu vers 800°C, grand feu vers 1300°C). Le four possède quatre foyers pour bien répartir la chaleur.

Une cuisson nécessite 25 stères de bois qui seront brûlées en 48 heures avec une technique subtile et savante de montée en température. Le four met ensuite entre quinze et vingt jours pour se refroidir. Le mur qui barre la porte est démantelé pour laisser la place à l'intense moment du défournement. Cette tâche comme celle symétrique de l'enfournement prend plusieurs semaines. Le nombre de pièces dépendra de leur taille et de leur encombrement. Le plus couramment, ce sera un bonne centaine de pièces.

Il faut savoir que la cuisson dans ces fours donne des qualités d'émaux inégalables impossibles à obtenir avec d'autres techniques de chauffe. La très grande uniformité de la chaleur dans le four et le refroidissement extrêmement progressif explique ces qualités. Par ailleurs, ces fours sont les seuls capables de produire des pièces de taille exceptionnelle, dont Sèvres s'est fait une spécialité.

De nombreuses cartes postales d'époque ont immortalisé ces grands moments.

La dernière grande cuisson au bois a eu lieu en octobre 2006. Près de 180 pièces ont été mises à l'Epreuve du Feu, nom de l'exposition qui a ensuite présenté ces pièces, dans la Galerie Parisienne de la Manufacture, avant d'être dispersées pour la plus grande joie des amateurs. Près d'un an travail de l'ensemble des ateliers a été nécessaire pour fabriquer et décorer les pièces. Et l'ouverture du four, comme sa mise a feu ont été retransmises en direct à la télévision. La prochaine cuisson au bois sera indiquée sur le site officiel de la Manufacture.


Dictionnaire de chimie industrielle (Barreswil, A. Girard) 1864, tome 3, page 306, Fd Tandou et Cie