Rappels de Physique atomique et moléculaire

 

La notion de spectre a trouvé son explication avec l'avènement des théories de physique quantique ; pour comprendre d'où viennent les profils satellitaires observés dans le cas des naines blanches, il faut rappeler quelques notions fondamentales de physique moléculaire.

 

La Physique atomique et moléculaire au secours de la physique stellaire

L'accès à l'observation dans de nouveaux domaines de longueur d'onde ainsi que l'amélioration de la sensibilité des détecteurs et l'augmentation de la résolution spectrale des instruments posent de nouveaux problèmes aux spectroscopistes et aux modélisateurs. Le calcul de spectres synthétiques nécessite d'introduire dans un modèle d'atmosphère des spectres théoriques (ou expérimentaux) de plus en plus précis pour chaque couche de l'atmosphère (composition chimique, température et densité).
Dans l'environnement relativement dense et chaud dans lequel se forment les raies atomiques, celles-ci sont affectées par l'élargissement par effet Doppler, par effet Stark (collisions avec les électrons et les protons du milieu) et par collision avec les atomes neutres (principalement l'hydrogène). Il faut également signaler l'existence de spectres moléculaires induits par collisions (pour les molécules homonucléaires telles que H2 inactives en l'absence de collisions). Enfin, lorsque l'équilibre thermodynamique n'est pas réalisé, il est important de connaître les taux de collisions qui déterminent avec les probabilités radiatives les populations des niveaux.
Pour obtenir ces données atomiques et moléculaires, théorie et expérience sont complémentaires : ainsi, la spectroscopie précise nécessite des données expérimentales, mais la théorie est souvent nécessaire à la compression de spectres complexes, et les modèles théoriques peuvent apporter des résultats complémentaires dans des domaines de longueur d'onde inaccessible à l'expérience.

 

L'atome dans le modèle quantique

Principes de base
Les électrons d'un atome peuvent être décrits comme des fermions caractérisés par quatre nombres quantiques,
     - n est le nombre quantique principal qui détermine les niveaux d'énergie que peuvent occuper les électrons, depuis le niveau fondamental n = 1 jusqu'à l'infini par valeur entière
     - l est le nombre quantique azimutal et traduit la quantification du moment orbital de l'électron, avec la contrainte l = 0, 1, 2, ..., n-1
     - m est le nombre quantique magnétique, qui donne la projection du moment orbital sur l'axe de quantification, en observant m = -l, -(l-1), ..., 0, ..., l-1, l
     - s est le nombre quantique de spin et vaut pour l'électron +1/2 ou -1/2
Ce modèle, amorcé par Niels Bohr au début du XXème siècle, permet d'expliquer le comportement de l'atome en spectroscopie si l'on observe les remarques suivantes :
          - l'énergie de l'électron est quantifiée : elle ne peut prendre que des valeurs déterminées par n, les niveaux d'énergie
          - à chacun de ces niveaux est associé un état stable de l'électron : contrairement à ce qu'explique la mécanique classique, il ne rayonne pas, ne perd pas d'énergie et ne s'effondre pas sur le noyau
          - l'électron peut passer d'un niveau inférieur à un supérieur si on lui fournit la quantité d'énergie correspondant à l'écart entre les deux niveaux : inversement, il peut retomber sur un niveau inférieur en restituant de l'énergie (sous forme de photons). Ces sauts sont appelés transitions.

Règles atomiques de sélection - notion de raie
Certaines transitions électroniques ne sont pas possibles. En effet, ces règles de sélection permettent de définir les transitions du spectre en énergie de l'atome d'hydrogène qui nous intéresse ici. Plus particulièrement, on identifie entre autres
     - la série de Lyman, qui correspond aux transitions de niveau final n = 1. Elle donne des émission dans l'ultraviolet. Par exemple, la raie Lyman
a ou Lya correspond à une transition n1 = 1 et n2 = 2 à une longueur d'onde de 121,6 nm
     - la série de Balmer, qui correspond aux transitions d'état final n = 2. Elle est relative à des émissions de lumière visible. On appelle par exemple raie Balmer
a ou Ha la transition n1 = 2 et n2 = 3 à 656,5 nm

L'approche quantique complète du problème permet d'établir les règles de transition suivantes.
Dl = +1 ou -1
Dm = 0, +1 ou -1

 

Application aux molécules diatomiques

Analogies de notation
L'état de la molécule est décrit par les nombres quantiques n (niveau d'énergie), L (moment angulaire électronique) et
L (projection de L sur l'axe moléculaire). Ces nombres sont des entiers naturels. Pour une molécule formée de deux atomes A et B, on a L = LA + LB ; les valeurs de L dépendent de n : L = 0, 1, ..., n-1.
Tout plan contenant l'axe moléculaire est plan de symétrie de la molécule : les niveaux d'énergie ne dépendent donc que de | m | ; ces considérations montrent qu'on peut classer les états moléculaires selon
L = | M |. De même, L = | MA + MB | avec MA projection de LA sur l'axe moléculaire et MB celle de LB. Les valeurs de L dépendent de L :
Suivant la valeur de
L, l'orbitale moléculaire peut donc prendre différents états, que l'on repère par des majuscules grecques
     - à
L = 0 correspond S
     - à
L = 1 correspond P
     - à
L = 2 correspond D

Propriétés de symétrie
Chaque niveau correspondant à un
L est doublement dégénéré. Les termes électroniques L = 0 ne le sont cependant pas. Par ailleurs, un état symétrique par rapport à un plan contenant l'axe molaire (état S+) ne présente pas le même niveau d'énergie qu'un état antisymétrique (état S-) par rapport à ce même plan.
Pour les molécules diatomiques possédant un centre de symétrie - ce qui est le cas des homonucléaires - les probabilités de présence sont les mêmes de part et d'autre de ce centre de symétrie. En conséquence, les fonctions d'onde peuvent être ou symétriques, ou antisymétriques par rapport à ce centre. On notera respectivement les états symétriques (gerade)
Lg et les états antisymétriques (ungerade) Lu.

Dégénérescence de spin
Soit S le spin électronique total qui peut être obtenu à partir des règles de couplage des moments cinétiques. Lorsque les couplages spin-orbite dus aux effets relativistes sont négligeables (ce qui est le cas pour la molécule H2), une dégénérescence d'ordre 2S+1 est attribuée au terme L. On écrit l'état électronique complet sous la forme 2S+1
L.

Concept de quasi-molécule
On a vu que l'atmosphère des naines blanches était très pure et essentiellement composée d'atomes d'hydrogène ; les collisions sont omniprésentes.
Une quasi-molécule est une molécule temporaire formée lors de la collision entre un atome d'hydrogène et un atome d'hydrogène neutre pour la quasi-molécule H2 ou un proton pour la quasi-molécule H2+. La formation de ces quasi-molécules modifie les spectres d'absorption des étoiles, en émettant à leur tour dans un domaine de longueur d'onde assez proche de la raie centrale : ces structures quasi-moléculaires engendrent des raies satellites.

Possibilités de transitions moléculaires
Dans le cas d'une molécule diatomique, on obtient les règles de transition

DL = -1, 0 ou +1

g <> u

DS = 0

et pour les états : S+ <> S+ et S- <> S-.

Orbitales moléculaires
Pour construire l'état électronique moléculaire, on utilise le plus souvent la notion d'orbitales moléculaires qui sont elles-mêmes construites à partir d'orbitales atomiques par une méthode variationnelle. Si
l = Si mi , on note s (l = 0), p (l = 1), d (l = 2) ...

Ainsi, pour H2, la correspondance est la suivante :
          ss donne 1S et 3S
          sp donne 1P et 3P
          g x g donne g
          g x u donne u
L'état fondamental (1
sg)(1sg) se note 1Sg+ ; un état excité comme (1sg)(1su) se note 3Su+.

Pour déterminer les transitions contribuant à une transition Lyman ou Balmer, il faut construire les diagrammes de corrélation entre états atomiques et états moléculaires afin de dénombrer tous les états moléculaires obtenus et par conséquent toutes les transitions pouvant contribuer à Lyman ou Balmer. En effet, pour expliquer l'origine des raies satellites, tous les états moléculaires pouvant apparaître au cours de collisions (entre deux atomes neutres ou entre un atome neutre et un proton) doivent être répertoriés.