Le cabinet de Physique de Sigaud de Lafond

 

 

 

Des appareils nécessaires pour les expériences de la lumière
( Tome 2 page 235)

Le feu mis en action d'une certaine manière, produit des effets bien différens de ceux que nous avons développés dans l'Article précédent. Il produit une lumière plus ou moins vive, à l'aide de laquelle nous distinguons les objets qui nous environnent. Mais cette modification particuliere du feu, cet éclat que la lumiere répand, est-il l'effet d'une émission réelle de la substance propre du corps lumineux, ou n'est-il, comme le prétendent les Carthésiens, que l'effet d'une matiere particuliere universellement répandue dans l'univers materiel, & mise en action par les corps que nous nommons lumineux ? C'est une grande question, elle fut long-tems agitée en Physique, & les sentimens furent aussi long-tems partagés. Mais la plus saine partie des Physiciens convient actuellement que la lumiere qui nous éclaire est une véritable émanation du corps lumineux, qui se meut avec une rapidité extrême, & et qui franchit en huit minutes environ, l'espace qui nous sépare du soleil. Si cette opinion souffre encore quelques difficultés auxquelles on ne répond point aussi démonstrativement qu'il seroit à désirer, elle n'est point exposée, comme celle des Carthésiens, quelques modifications qu'on lui ait fait subir, à des absurdités frappantes qui en décelent la fausseté ; d'ailleurs, en embrassant cette derniere opinion, on est obligé de supposer un mouvement progressif de la lumiere, pour en developper convenablement les phénomènes, comme on peut le voir dans le cinquième volume des Leçons de Physique de l'Abbé Nollet, qui est, sans contredit, celui de tous les Carthésiens qui a le mieux défendu cette opinion.

De toutes les expériences qu'on peut faire en Physique, ou qu'un Amateur peut répéter pour sa satisfaction, il n'en est point de plus difficiles & de plus épineuses que celles qui concernent la lumiere. Cette difficulté ne tient ni à la dextérité de celui qui opere, nous la supposons telle qu'elle doit être, ni à la construction des instrumens, qu'on peut rendre très exacts & très faciles à manier ; elle vient des circonstances, du lieu & du tems. Il est peu d'endroits où l'on puisse librement disposer d'une position favorable à ces fortes expériences ; & en supposant cette difficulté levée, il est peu de jours, sur-tout dans notre climat, où le soleil se montre à découvert & sans nuages, aux heures où il convient d'opérer. Nous avons donc cru rendre un bon service aux Physiciens, en élaguant cette multitude étonnante d'expériences qu'on trouve décrites dans les Ouvrages de Physique ; en ne leur préférant que celles qui paroissent les plus importantes, pour constater les propriétés qu'ils ont intérêt de démontrer, pour établir la certitude des phénomenes & des loix que la lumiere suit dans les différens mouvemens, & en leur offrant les appareils les plus simples & les plus faciles à manier.

La lumière qui émane du soleil & qui arrive jusqu'à la surface de notre globe, est susceptible de différens mouvemens qu'il est important de connoître. La constitution même de ce fluide est encore un objet qui mérite l'attention du Physicien. En supposant que l'espace qu'il parcourt dans son trajet soit absolument vide, ou rempli d'une matiere homogène qu'il traverse perpendiculairement, & qu'il n'éprouve aucun changement manifeste, aucune déviation depuis le disque du soleil, jusqu'à la surface de notre globe, ce qui n'est que pure supposition : on doit d'abord considérer son mouvement direct, de quelle manière la lumiere vient à nous, la vîtesse avec laquelle elle se propage, ce qui arrive à ses rayons en quantité de circonstances ; & c'est l'objet d'une partie de la Physique qu'on connoît sous le mon d'Optique proprement dite ; car on donne en général le nom d'Optique à la Science qui traite de la lumiere, de quelque maniere qu'on la considere. On doit observer ensuite les changemens qu'elle éprouve lorsquelle se meut & qu'elle traverse, sous différens angles, des milieux dont les densités sont différentes. Cette manière de considérer les mouvemens de la lumiere, fait l'objet d'une Science qu'on appelle Dioptrique. On doit encore observer ce qui arrive à ce fluide, lorsqu'il rencontre sur son passage des corps qu'il ne peut pénétrer, & qu'il se réfléchit ; ce qui fait une partie non moins intéressante de la Physique, qu'on appelle Catoptrique. Considérant enfin la constitution propre de ce fluide, le Physicien doit décomposer la lumiere & faire observer les propriétés essentielles des rayons dont chaque faisceau lumineux est composé ; ce qui le conduit à la théorie des couleurs.

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